Programme Régional GERME
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Les maisons du quai

Sur le quai de Podor, une dizaine de maisons construites au début du 19ième siècle par les négociants bordelais, pour la plupart, Foy, Teissère, Singer, Granges, Maurel, Gaspard Devès, Guiches, Marc Merle, Marc Maurel, Magdeleine Pellegrin, Besmencheliers, Moulaye, fara, Biram, Descement, Roger, Buhan Ruhaut, dont les noms de certains restent d’actualité dans le monde du négoce international. Cette présence en force de négociants sur le quai de Podor témoigne de l’effervescence du commerce qui en a marqué l’histoire pendant près de deux siècles.
Le commerce fluvial a de tout temps été florissant en effet, et ce, jusque dans les années qui ont précédé l’indépendance du Sénégal. Le quai de Podor, construit par Faidherbe puis remodelé à plusieurs occasions, accueillait des dizaines de bateaux à moteur et à voile qui utilisaient le fleuve pour le transport des marchandises et le commerce entre ses rives. Chaque jour les bateaux accostaient pour y débarquer dans ces maisons alors prospères des marchandises venues d’Europe, de Bordeaux pour la plupart, de même que des objets de pacotille, des vivres et autres textiles, et, en retour,  embarquer les produits locaux : mil, ambre, gomme arabique et autres.
La construction de la route nationale 2, avant et après les indépendances, à l’écart des zones inondables, donc loin du Fleuve, notamment à Podor où la route passe 22 km au Sud du fleuve, a entraîné le déclin du commerce fluvial. Les bateaux de commerce se sont faits rares, jusqu’à disparaître, ou alors se sont arrêtés sur place, comme la péniche de M Diop, arrimée au quai de Podor qui, il y a quelques dizaines d’années, transportait encore des marchandises jusqu’à Kaye, au Mali.
Ces maisons construites avant le quai lui-même témoignent aujourd’hui encore de la vitalité des échanges commerciaux de l’époque. Ces maisons s’ouvraient d’un côté vers le Fleuve, pour permettre le stockage des marchandises dans les entrepôts, et de l’autre côté, sur la rue commerçante et la ville.
Semblables aux maisons qui ont fait la réputation de Gorée et de St Louis, les murs des maisons du quai de Podor montés avec des briques jointes à la chaux naturelle, les toitures sont couvertes de tuiles de terre cuite (marseillaises, pour la grande majorité d’entre elles). Elles sont toutes construites selon le principe architectural du rez-de-chaussée consacré au commerce, et de l’étage consacré aux espaces de vie.

 

la Maison Guillaume Foy

La maison située au coin Nord du quai porte le nom de Guillaume Foy. Elle est classée nominativement patrimoine national au même titre que « le quai et ses bâtisses ». La date de sa construction nous est encore inconnue. Par recoupement, au regard des dates de mariage et de décès de Catherine Foy, la fille de Guillaume Foy, on pense que la Maison existait dans les années 1820/1830. Un travail de recherche effectué auprès du service des Domaines de St Louis devrait nous en dire plus sur la création de la maison et ses propriétaires successifs.

Guillaume Foy était l’un des grands négociants bordelais qui développèrent le commerce entre la France et le Sénégal à partir de la fin du 18ième siècle. Il était l’époux Henriette Descemet avec qui il n’eut qu’une fille, Catherine.

Il joua un rôle essentiel dans les anciennes pratiques de traite de la gomme et dans la Compagnie de Galam dissoute en 1848. Contrairement à d’autres familles dont les noms restèrent gravés dans l’histoire du commerce fluvial et régional à travers les grandes  maisons de commerce dont certaines perdurent encore aujourd’hui (Peyrissac, Buhan Teissère, Maurel et Prom, …), le nom de Foy ne survécut pas à Guillaume. Il se perpétua à travers la famille Devès par le biais Gaspard Devès qui épousa Catherine Foy, la fille de Guillaume, vers 1850, puis de Justin, qui fut maire de St Louis au début du 20ième siècle.

Cette maison était au centre du commerce de la gomme arabique, qui venait de Mauritanie comme du Ferlo, et elle semble y être resté jusqu’au milieu du 20ème siècle. Construite au début du 19ème siècle puis arrangée, au fil du temps et des propriétaires qui s’y sont succédés, elle vient d’être  restaurée par ses nouveaux propriétaires qui, soucieux de lui redonner ses lignes et lustre d’antan, ont su observer, chercher à comprendre comment les choses avaient évolué.

Par la suite la Maison Guillaume Foy fut maintes fois cédée, toujours à des commerçants, notamment à un certain Lakhmery, d’origine marocaine, qui y développa un commerce dans les années 30/40 avant de la revendre à Abdoulaye Gueye en 1954.

Oumar Ly, le photographe bien connu de Podor, y venait souvent quand il était enfant, car son père y travaillait, aussi ne rate-t-il pas l’occasion d’y faire des petites visites (nostalgie oblige). Et il y est le bienvenu !

 

Les propriétaires de la Maison Guillaume Foy depuis 1938

1938 : Samba Gaye et Yacine Thioub, propriétaires

8/04/1938 : Achat par Mohamed Lakhméry, commerçant, né à Fez en avril 1900, aux héritiers Samba Gaye et Yacine Thioub

3/08/1940 : Immatriculation de la maison par Sidi Mohamed Lakhméry. Il décède au km 41 entre Saint Louis et Rosso le 10 octobre 1950

15/06/1953 : Mutation par décès à sa veuve Zeynabou el Hamoudy, à ses deux fils Mohamed Aze Larabe, né à Podor, et Kamal, et à ses trois filles : Fathma, Najatte et Karima, enfants mineurs

15/06/1953 : Adjudication à sa femme Zeynabou el Hamoudy et à trois de ses cinq enfants

1954 : Achat de la maison par Abdoulaye Gueye, né en 1911 à Saint-Louis, époux de Haby Thiokel Ba et Rokaya Aidara. Il décède le 16/11/1982.         

15/09/2005 : Achat de la maison aux héritiers de feu Abdoulaye Gueye par la SCI du Tékrour (Anne Jean-Bart, Michèle et Patrick Scalbert, Eric Silvestre, Nadjirou Sall et Seydou Ba Silvestre).

2012 : Entrée d’Abel Ndong dans la SCI du Tékrour

 

Pour la petite histoire, le jour où la plaque de céramique (offerte par le céramiste Mauro Petroni) portant l’inscription Maison Guillaume Foy, a été scellée sur le mur de la façade de la Maison, la radio sénégalaise a diffusé un reportage sur l’histoire de Podor, le commerce de la gomme arabique, et Guillaume Foy !

La Maison Gaspard Devès

Gaspard Devès était le fils de Bruno Devès, arrivé au Sénégal au 18ième siècle avec la Méduse (avant qu’elle ne fasse naufrage au ban d’Argun). Ce dernier s’installa dans la zone et y épousa Coumbel Ardo Ka, une belle peule du Diéri connue, par la suite, sous le nom de Sylvie Bruno. Leur fils Gaspard naquit en 1827. Il épousa Catherine Foy, la fille de Guillaume Foy, en 1851, laquelle décéda peu après, le 16 octobre 1851, à l’âge de 21 ans, en couche ou peu après la naissance de leur fille Virginie. Cette enfant ne disposait pas de toutes ses facultés mentales et son père Gaspard fut chargé de gérer les biens dont elle hérita de sa mère Catherine puis de ses grands-parents, ce, jusqu’à sa mort, dans les années 60.aspard Devès épousa en secondes noces, Fatma Daba Daguisery Tamba Diop, fille de Tamba Diop, une soninké originaire de la famille Ndiaye, fondatrice de la ville de Bakel. Ils n’ont célébré leur mariage que tardivement, le 5 mai 1889, Madeleine étant alors malade et alitée, le mariage a été exceptionnellement célébré au domicile des mariés. Gaspard Devès a eu, de cette union, neuf enfants, dont Justin, futur Maire de Saint Louis, et Guillaume, probablement en souvenir de Guillaume Foy, son premier beau-père. Ce dernier a épousé la vicomtesse Marie Louise de Barès du Molard. De cette union est née Pierre Devès qui a eu deux filles : Madeleine, en souvenir de Madeleine Devès, sa grand-mère, et Suzane. Gaspard Devès fit une longue carrière dans le commerce et la politique entre Saint Louis et Podor et fut omniprésent dans les affaires coloniales tout en prenant le parti des nationaux. « Gaspard Devès, par son mariage avec Catherine Foy, fille de Guillaume Foy, un grand commerçant créole, entreprit d’animer à Saint-Louis la résistance des habitants aux négociants bordelais ». Ce qui lui valut d’être dans le collimateur de l’administration française, grand ami du Roi du Cayor. Il fut l’un des cofondateurs de la Banque du Sénégal, créée en 1853    

« Nul n’ignore à Saint Louis les relations d’amitié qui existaient entre votre honorable père et le mien. C’est Monsieur Gaspard Devès qui intervenait dans les conflits qui se produisaient entre le Gouvernement français et mon père, alors roi du Cayor et c’est grâce à lui que les traités de paix étaient signés, ... , En vertu de cette amitié, je puis presque, selon les usages indigènes vous considérer comme frère, quoique vos conditions soient différentes » 
Votre tout dévoué M Bakhane Diop

Sources :

  • Madeleine Devès Senghor : inspecteur du travail, peintre, historienne, descendante de Gaspard Devès (Dakar et Saint Louis, Sénégal, membre d’honneur de l’association Podor rive gauche)
  • Ghislaine LYDONMichigan State University, East Lansing Les péripéties d’une institution financière : la Banque du Sénégal, 1844-1901 Le réseau d’influence bordelais : la « doyenne » Maurel et Prom ...
  • Yves Péhaut, ancien professeur de géographie à l’Université Michel de Montaigne-Bordeaux 3 et spécialiste de l’histoire de l’économie ultramarine girondine et sénégalaise : Gaspard Devès, par son mariage avec Catherine Foy, fille de Guillaume Foy, un grand commerçant. Le réseau d’influence bordelais : la "doyenne" Maurel & Prom jusqu’en 1914.

Nous sommes à la recherche d'informations sur les autres maisons de la façade principale du quai de Podor sur le fleuve Sénégal. Les maisons Teissère, Singer, Granges, Maurel,  Guiches, Marc Merle, Marc, Maurel, Magdeleine Pellegrin, Besmencheliers, Moulaye, fara, Biram, Descement, Roger, Buhan Ruhaut.

      ACTUALITES

 

Si Patrick Scalbert ne nous avait pas quités en juillet dernier, emporté par la maladie, il compterait aujourd'hui parmi les fondateurs et acteurs de Lappôl France. Il en est membre d'honneur à titre posthume, et il restera présent dans nos pensées pendant de longues années. 

Lettre d'information des associations Lappôl
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